homélie du 26° dimanche

Lecture du livre des Nombres

En ces jours-là, le Seigneur descendit dans la nuée pour parler avec Moïse. Il prit une part de l’esprit qui reposait sur celui-ci, et le mit sur les 70 anciens. Dès que l’esprit reposa sur eux, ils se mirent à prophétiser, mais cela ne dura pas. Or, deux hommes étaient restés dans le camp ; l’un s’appelait Eldad, et l’autre Médad. L’esprit reposa sur eux ; eux aussi avaient été choisis, mais ils ne s’étaient pas rendus à la Tente, et c’est dans le camp qu’ils se mirent à prophétiser. Un jeune homme courut annoncer à Moïse : « Eldad et Médad prophétisent dans le camp ! » Josué, fils de Noun, auxiliaire de Moïse depuis sa jeunesse, prit la parole : « Moïse, mon maître, arrête-les ! » Mais Moïse lui dit : « Serais-tu jaloux pour moi ? Ah ! Si le Seigneur pouvait faire de tout son peuple un peuple de prophètes ! Si le Seigneur pouvait mettre son esprit sur eux ! »

Évangile de J- Christ selon saint Marc

En ce temps-là, Jean, l’un des Douze, disait à Jésus : « Maître, nous avons vu quelqu’un expulser les démons en ton nom ; nous l’en avons empêché, car il n’est pas de ceux qui nous suivent. » Jésus répondit : « Ne l’en empêchez pas, car celui qui fait un miracle en mon nom ne peut pas, aussitôt après, mal parler de moi ; celui qui n’est pas contre nous est pour nous. Et celui qui vous donnera un verre d’eau au nom de votre appartenance au Christ, amen, je vous le dis, il ne restera pas sans récompense. Celui qui est un scandale, une occasion de chute, pour un seul de ces petits qui croient en moi, mieux vaudrait pour lui qu’on lui attache au cou une de ces meules que tournent les ânes, et qu’on le jette à la mer.  Et si ta main est pour toi une occasion de chute, coupe-la. Mieux vaut pour toi entrer manchot dans la vie éternelle que de t’en aller dans la géhenne avec tes deux mains, là où le feu ne s’éteint pas. Si ton pied est pour toi une occasion de chute, coupe-le. Mieux vaut pour toi entrer estropié dans la vie éternelle que de t’en aller dans la géhenne avec tes deux pieds. Si ton œil est pour toi une occasion de chute, arrache-le. Mieux vaut pour toi entrer borgne dans le royaume de Dieu que de t’en aller dans la géhenne avec tes deux yeux, là où le ver ne meurt pas et où le feu ne s’éteint pas. »

Voilà des textes bien difficiles pour ma première messe à Plainoiseau. Mais ces lectures sont celles que l’Eglise nous donne en ce dimanche et nous devons les recevoir comme un cadeau. Et je crois bien, qu’en relisant calmement ces textes nous pouvons y découvrir des trésors pour notre vie à venir, pour l’année qui s’ouvre devant nous. Que l’on soit paroissiens occasionnels ou réguliers, jeunes ou âgés, ces textes nous font au moins deux invitations particulières : l’une à ne pas faire clan, l’autre à se rappeler que Dieu nous voit tel que nous sommes, traversés dans nos cœurs par le bien et le mal. Je les reprends avec vous.

1ière invitation : ne pas faire clan. On peut parfois croire qu’on est les seuls amis de Dieu, les seuls autorisés à parler et agir en son nom et cela parce que nous appartenons à son groupe, à l’Eglise ou alors parce que dans l’Eglise nous avons été choisis pour telle ou telle mission. Ainsi dans la première lecture Josué, qui est un ami de Moïse, ne veut pas qu’Eldad et Médad reçoivent aussi une part de l’esprit de Dieu car ils n’étaient pas du groupe de Moïse ! Et c’est la même chose dans l’évangile, Jean, un ami de Jésus qui voit un homme guérir des personnes du mal veut l’en empêcher car, dit-il,  il n’est pas de ceux qui nous suivent. 

Tous nous avons envie de dire que Josué et Jean ne sont pas très sympathiques, voir qu’ils ont un comportement sectaire (qui vient du latin sécare : c’est-à-dire couper, séparer) qu’ils font un peu clan et qu’ils sont jaloux de leur groupe, de leur pouvoir, refusant que d’autres y entrent ou aient les mêmes pouvoir qu’eux. Pourtant si nous réfléchissons un peu avec honnêteté, ne sommes-nous pas parfois un peu comme eux ? Autant entre personnes d’Eglise, qu’entre collaborateurs dans la même boite, qu’entre habitants du même village, du même niveau social, du même lycée, de la même équipe de sport, etc… est-ce que nous aussi nous ne faisons pas parfois des clans et ne refuse-t-on pas à certains d’y entrer pour partager notre vie et nos activités ? Ne sommes-nous pas un peu jaloux de ce que nous avons, biens matériels, idées ou pouvoir, refusant de les partager ?

Aujourd’hui donc nous sommes invités par Moïse et Jésus à nous réjouir de ce que l’Esprit de Dieu et l’amitié avec Jésus débordent de notre Eglise, de nos groupes, de nos structures. Nous devons espérer la même chose que Moïse et dire avec lui : « Ah ! Si le Seigneur pouvait faire de tout son peuple un peuple de prophètes ! Si le Seigneur pouvait mettre son esprit sur eux ! »

Dieu veut nous donner à tous le même cadeau pour vivre en frère, son Esprit Saint. Un Esprit qui fera de nous tous une seule et grande famille où régnera la fraternité et la joie de partager nos dons et nos talents avec les autres et à leur service.

2ième invitation : Dieu nous voit tel que nous sommes. Le texte un peu difficile de l’évangile que nous venons d’entendre est une invitation à nous voir tel que nous sommes. Jésus nous propose de nous regarder dans le miroir de la vérité. Et cela exige d’ôter le verni social que nous avons mis sur notre vie. Nous voulons toujours les présenter à Dieu et aux autres sans défaut, sans tâche, sans égratignure. Et souvent ce désir de paraître réglo, « bien sous tout rapport », nous fait oublier le mal et la souffrance qui sont dans nos cœurs, mal et souffrance que nous subissons ou faisons subir. En nous invitant d’une manière très imagée à « couper » ce qui nous fait pécher, Jésus nous invite à nous regarder en face avec nos faiblesses, nos pauvretés et nos péchés. Ainsi ce matin, Dieu me propose de me présenter à lui et aux autres (mon conjoint, les membres de ma famille, de ma communauté, de mon entreprise, de mon lycée) dans la réalité de ma vie : à la fois belle et moche, lisse et cabossée, sainte et pécheresse. En reconnaissant devant eux ce que je suis et donc ce qui me manque, je peux recevoir d’eux compréhension, aide et même pardon. En nous acceptant tels que nous sommes devant les autres nous pouvons recevoir d’eux compassion, soutient et encouragements. En nous acceptant tels que nous sommes devant Dieu, nous pouvons accueillir ce qu’il veut que nous devenions : ses fils et ses filles, ses enfants qui attendent les bras ouverts d’être saisis par leur Père  et déposés sur son cœur.

Voilà je crois une belle manière de vivre l’année qui vient, en ouvrant nos groupes, nos équipes à d’autres et en reconnaissant entre nous et devant Dieu nos limites et donc aussi le besoin des autres et de Dieu qu’elles suscitent. Amen