Évangile de J-C selon saint Luc
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Je suis venu apporter un feu sur la terre, et comme je voudrais qu’il soit déjà allumé ! Je dois recevoir un baptême, et quelle angoisse est la mienne jusqu’à ce qu’il soit accompli ! Pensez-vous que je sois venu mettre la paix sur la terre ? Non, je vous le dis, mais bien plutôt la division. Car désormais cinq personnes de la même famille seront divisées : trois contre deux et deux contre trois ; ils se diviseront : le père contre le fils et le fils contre le père, la mère contre la fille et la fille contre la mère, la belle-mère contre la belle-fille et la belle-fille contre la belle-mère. »
Voilà des paroles sorties de la bouche de Jésus qui tranchent avec celles que nous lui entendons prononcer habituellement. Elles s’inscrivent dans le discours de Jésus dédié à la fin des temps et au jugement dernier qui s’étend sur tout le chapitre 12 de Luc. Dans ce chapitre, Jésus exhorte les croyants à se tenir prêts en vue de son retour dans la gloire et du jugement qui suivra. Ce jugement portera autant sur ce que nous aurons dit de Lui que sur nos comportements : aurons vraiment agit selon la foi transmise par les apôtres ?
En effet, préparant mon homélie je remarquais que depuis que je suis enfant, j’ai toujours entendu mes catéchistes et maintenant que je suis prêtre, les catéchistes avec lesquelles je collabore, annoncer que Jésus était un gentil grand frère dans la foi, un Dieu d’amour qui veut aimer tous les hommes et faire leur unité. Mais jamais je n’ai entendu dire que Jésus provoque la division, pourtant il l’affirme de lui-même à la fin de l’évangile : Pensez-vous que je sois venu mettre la paix sur la terre ? Non, je vous le dis, mais bien plutôt la division. Il ne s’agit pas pour moi de faire le procès de la catéchèse et de ce que l’on dit (étant catéchiste moi-même) mais de souligner que l’on est parfois très sélectif sur ce que l’on veut faire connaître de Jésus. Notre vision de Jésus, si elle n’est jamais confrontée à la foi de l’Eglise et enrichie par elle, peut devenir dans notre cœur l’unique vérité sur Dieu. Et alors sans s’en rendre compte, le Jésus que l’on annonce se trouve réduit à n’être qu’un simple prophète envoyé par Dieu ou un exemple de vie humaine ou encore à un beau personnage de conte qui aide à faire grandir les enfants. Perdant ainsi sa qualité essentielle : celle d’être l’unique Fils de Dieu, rédempteur du genre humain, donateur de l’Esprit Saint.
Or Jésus est en même temps le Dieu d’amour qui veut faire l’unité du genre humain et celui qui affirme qu’il vient mettre la division sur la terre. Il n’y a pas contradiction, mais plutôt des liens de causes à effets… voyons cela ensemble :
1/ Jésus dit : Je suis venu apporter un feu sur la terre, et comme je voudrais qu’il soit déjà allumé…Le discours de Jésus concernant la fin des temps, le feu dont il parle est celui de l’Esprit Saint répandu sur toute la terre. C’est l’Esprit Saint qui permettra de connaître en vérité le Père et Jésus son envoyé. C’est l’Eprit qui nous aidera à comprendre toute chose et à saisir combien Jésus est Dieu et Fils de Dieu. L’Embrasement du monde par le feu de l’Esprit fait de Jésus un pyromane de l’amour divin. En embrasant le monde de son amour Jésus permet à tous ceux qui le veulent d’accueillir le Salut et la paix que donne sa vie offerte sur la croix.
2/ Jésus dit : Je dois recevoir un baptême, et quelle angoisse est la mienne jusqu’à ce qu’il soit accompli ! Jésus poursuit son propos en réaffirmant qu’il doit d’abord passer par la mort, plonger en elle pour la vaincre. Car sa vie offerte est l’étape nécessaire à l’embrasement du monde par l’Esprit Saint. Et cela lui procure de l’angoisse, car dans son cœur se profile déjà Gethsémani et la concrétisation du poids du péché du monde pour lequel il offrira sa vie.
On a aujourd’hui bien du mal à l’accepter car on ne peut saisir ce que cela représente. La souffrance du Seigneur Jésus fut extrême car il a saisit spirituellement et corporellement ce qu’est le péché du monde. Son offrande sur la croix rachète tous les péchés des hommes depuis la création jusqu’à la fin des temps. Mais surtout Jésus rachète infiniment chacun de nous.
Et c’est cela alors que vient souligner la troisième parole de Jésus dans l’évangile.
3/ Jésus dit : Pensez-vous que je sois venu mettre la paix sur la terre ? Non, je vous le dis, mais bien plutôt la division.
Celui qui saisit que Jésus l’a aimé et sauvé personnellement, c’est-à-dire qui reconnait la part de mal et de péché qu’il y a en lui, celui-là ne peut plus vivre selon le monde, il ne peut plus vivre comme les autres car il comprend ce que fut l’offrande du Christ et il veut la recueillir et la faire sienne. La Passion de Jésus a désormais un grand prix à ses yeux et l’Eucharistie devient le lieu où Jésus renouvelle ce don inouï de son amour total. Pour Christ, frères et sœurs, sommes nous prêts à vivre vraiment différemment du reste du monde, non pas en nous pensant supérieurs ou plus purs que les autres, mais en réalisant l’amour dont Dieu nous aime en Jésus. Cet amour dont il nous faut aimer à notre tour pour transformer ce monde, sachant que n’étant pas plus grand que Jésus notre Maitre, nous souffrirons souvent le rejet et le mépris. Mais curieusement notre fidélité sauvera ceux que nous aimerons et dans la joie nous les retrouverons au ciel unis tous ensemble pour louer l’amour infini du sauveur.
Alors je voudrais terminer par un extrait de la prière du père Poucel mort en 1953, puisse-t-elle vous aider à offrir sans retour votre vie au Christ, pour le salut du monde.
Et que faisiez-Vous, Seigneur, pendant Vos heures de la Croix ? … « Je m’offrais pour toi »
Pendant ces heures, de quoi Vous avez le plus souffert ? … « De toi »
Hélas, Jésus, Vous portiez les péchés de tous, leur poids s’accumulait ; mais dites-moi de quelle épine j’ai percé Votre front. ..: « De toutes »
Quoi, Seigneur, et c’est moi aussi qui Vous ai flagellé, et moi qui Vous ai cloué, et moi qui Vous ai tué ! Et les autres alors, Seigneur, les autres qu’ont-ils fait ? … « Ma passion c’est toi »
Mon Sauveur, Votre âme n’était-elle pas alors dans la détresse et la crainte. Dites-moi ce que Vous avez redouté le plus. …. « de te perdre » . Amen