Évangile de Jésus Christ selon saint Luc
En ce temps-là, de grandes foules faisaient route avec Jésus ; il se retourna et leur dit : « Si quelqu’un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et sœurs, et même à sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple. Celui qui ne porte pas sa croix pour marcher à ma suite ne peut pas être mon disciple.
Quel est celui d’entre vous qui, voulant bâtir une tour, ne commence par s’asseoir pour calculer la dépense et voir s’il a de quoi aller jusqu’au bout ? Car, si jamais il pose les fondations et n’est pas capable d’achever, tous ceux qui le verront vont se moquer de lui : ‘Voilà un homme qui a commencé à bâtir et n’a pas été capable d’achever !’ Et quel est le roi qui, partant en guerre contre un autre roi, ne commence par s’asseoir pour voir s’il peut, avec dix mille hommes, affronter l’autre qui marche contre lui avec vingt mille ? S’il ne le peut pas, il envoie, pendant que l’autre est encore loin, une délégation pour demander les conditions de paix.
Ainsi donc, celui d’entre vous qui ne renonce pas à tout ce qui lui appartient ne peut pas être mon disciple. »
« Il faut toujours avoir les moyens de ses ambitions. » Voilà un proverbe de chez nous qui pourrait bien illustrer les propos de Jésus aujourd’hui. En effet, le ridicule tombe souvent sur celui qui fonce tête baissée sans réfléchir posément à ce qu’il compte faire et aux moyens d’y parvenir. Ainsi nous devons d’abord nous poser la question : quelles sont nos ambitions ? Pour ensuite nous demander par quels moyens les atteindre ?
1/ quelles sont nos ambitions ? Il ne s’agit pas pour moi ce (soir) matin de découvrir et de lister toutes vos ambitions : ni les plus attendues, ni les plus inavouables. Cela ne me regarde pas. Il s’agit plutôt de vous redire quelles sont les ambitions qu’un chrétien peut légitimement viser. Pour cela, scrutons la Parole de Dieu qui nous a été lue. On y trouve, dans le psaume 89 (90), le verset suivant : Rassasie-nous de ton amour au matin, que nous passions nos jours dans la joie et les chants. L’ambition qui se cache derrière cette demande est celle de la vie éternelle auprès de Dieu. En effet, être rassasié de l’amour de Dieu au matin, c’est jaillir vivant du tombeau au jour la résurrection. Et passer nos jours dans la joie et les chants signifie vivre éternellement dans la joie de Dieu, chantant sans se lasser ses louanges.
Notre ambition de chrétien exige donc de lever les yeux vers le ciel afin de mettre un pied non pas dans la tombe mais déjà dans le royaume de Dieu. Gardons aux lèvres cette demande inscrite encore dans le psaume : Apprends-nous la vraie mesure de nos jours. Oui ne nous lassons pas de demander à Dieu d’ancrer dans notre cœur la belle certitude que notre vie va bien au-delà de ses jours terrestres. En effet, au jour de notre baptême, le prêtre a interrogé nos parents : « que demandez-vous pour votre enfant ? » et l’une des réponses que le rituel invite à donner est : « la vie éternelle ». Ainsi notre baptême oriente nos vies vers l’éternité.
Est-ce là votre ambition, frères et sœurs ? Si oui alors regardons ensemble les moyens d’y parvenir
2/ par quels moyens atteindre nos ambitions ? Quels moyens mettre en œuvre pour accéder à la vie éternelle reçue à notre baptême ? Jésus répond par une unique invitation : se faire son disciple. C’est d’une simplicité évangélique : imiter Jésus sur cette terre est le meilleur moyen de partager sa vie au ciel ! Seulement être disciple exige deux comportements décrit par lui : celui du constructeur et celui du guerrier.
a) être constructeur. Vivre en disciple c’est l’affaire de toute une vie, une construction pierre après pierre de notre amitié avec Jésus. Voilà pourquoi Jésus affirme : si quelqu’un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et sœurs, et même à sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple. Est-ce bien ainsi que nous percevons Jésus ? Est-il celui que nous mettons en premier dans notre vie ?
b) être guerrier. Vivre en disciple de Jésus n’est jamais chose acquise mais plutôt un combat permanent. Si vous ne vous interrogez plus sur votre foi, si tout vous semble aller de soi, normal ou naturel, demandez-vous si vous êtes encore chrétien. Car Jésus rappelle en quoi consiste le combat de la foi : Celui qui ne porte pas sa croix pour marcher à ma suite ne peut pas être mon disciple. Et la plus grande croix qu’il nous faut porter c’est de renoncer à nous même. Quitter nos points de vues, nos certitudes, nos compromis avec la vérité, nos petites habitudes qui nous font esclaves de la médiocrité, etc. Oui c’est un vrai combat de quitter l’homme ancien et de laisser jaillir en nous l’homme nouveau sauvé et transfiguré par le Christ.
Alors interrogeons-nous : baissons-nous les bras devant nos travers ? Avons-nous renoncé à nous convertir ? Pour moi, la vie chrétienne est-elle toujours un combat ?
3/ L’Esprit Saint est notre guide. Visant la vie éternelle par les moyens de la construction de notre amitié avec le Christ et le combat spirituel, nous savons que nous pouvons y parvenir par l’Esprit Saint qui nous est donné. Faisons nôtre l’affirmation du livre de la Sagesse : qui aurait connu ta volonté, si tu n’avais pas donné la Sagesse et envoyé d’en haut ton Esprit Saint ? Invoquons sans cesse et sans réserve l’un et l’autre pour nous aider. C’est cela que nous allons faire maintenant dans l’Eucharistie. Le Christ, qui est la sagesse de Dieu, dresse la table pour nous et par l’invocation de l’Esprit Saint, le pain et le vin vont devenir son Corps et son Sang.
Que notre communion à ce grand mystère qui exprime notre amitié au Seigneur et sème en nous la vie éternelle, soit notre nourriture pour mener jusqu’au bout notre combat pour demeurer des disciples fidèles. Amen.