par le père Arnaud Brelot
Lecture de la lettre aux Hébreux
Frères, en Jésus, le Fils de Dieu, nous avons le grand prêtre par excellence, celui qui a traversé les cieux ; tenons donc ferme l’affirmation de notre foi. En effet, nous n’avons pas un grand prêtre incapable de compatir à nos faiblesses, mais un grand prêtre éprouvé en toutes choses, à notre ressemblance, excepté le péché. Avançons-nous donc avec assurance vers le Trône de la grâce, pour obtenir miséricorde et recevoir, en temps voulu, la grâce de son secours.
Le Christ, pendant les jours de sa vie dans la chair, offrit, avec un grand cri et dans les larmes, des prières et des supplications à Dieu qui pouvait le sauver de la mort,
et il fut exaucé en raison de son grand respect. Bien qu’il soit le Fils, il apprit par ses souffrances l’obéissance et, conduit à sa perfection, il est devenu pour tous ceux qui lui obéissent la cause du salut éternel.
Le Fils de Dieu a traversé les cieux pour nous rejoindre, d’abord en revêtant notre chair. Revêtir la chair, non pas comme on passe un vêtement, mais en assumant totalement ce que cela engageait : vivre parmi nous, de la même vie que nous, ressentant toutes les faiblesses de notre humanité dans son corps par la fatigue, la faim et la soif. Et Il voulut tout assumer de notre humanité, c’est pourquoi » comme il avait aimé les siens qui étaient dans le monde, il les aima jusqu’au bout » (Prière Eucharistique N°4)
Ainsi nous rejoint-il aussi dans nos souffrances et dans la mort. Et il l’a vécu dans sa chair comme on le lit dans l’épître aux Hébreux : Le Christ, pendant les jours de sa vie dans la chair, offrit, avec un grand cri et dans les larmes, des prières et des supplications à Dieu.
Il a offert sa Passion pour notre salut. Pour que désormais aucun d’entre nous ne soit seul face à la mort. Il s’est étendu et laissé lier sur la croix pour rejoindre chacun des souffrants, chacun des mourants. Il se tient à jamais tout à côté de celui qui souffre et meurt. Alors pour ceux qui ne peuvent plus, qui ne le savent pas, qui n’y croient plus, tournons aujourd’hui notre regard vers la Croix, « pour que tous ceux qui affrontent le mal et la mort « obtiennent miséricorde et reçoivent, en temps voulu, la grâce de son secours. »
Aussi pour vous y aider ce vendredi saint, je vous propose de vous placer face à un crucifix et de prendre le temps de la prière ci-dessous. Magnifique prière du Révérend Père Victor Poucel intitulée « Seigneur, pendant ces longues heures de la Croix, dites-moi à quelle chose Vous pensiez ». Elle se vit sous forme de dialogue avec le Christ en Croix.
Laissez-moi Vous faire une demande. Dites, Seigneur, pendant ces longues heures de la Croix, que Vous attendiez de mourir, dites-moi à quelle chose Vous pensiez.
Jésus : « Je pensais à toi »
Oui, Seigneur, je le sais, Votre regard m’a vu. Mais qui suis-je dans la foule de ce monde, et Vous avez regardé tant d’autres que moi.
Jésus : « Je te voyais seul »
Mais alors, sans doute, Vous m’avez aperçu d’un regard lointain comme une vision qui s’évanouit entre mille. Dites-moi le moment où Vous avez eu cette pensée de moi.
Jésus : « Je l’ai toujours »
Et que faisiez-Vous, Seigneur, pendant Vos heures de la Croix ?
Jésus : « Je m’offrais pour toi »
Seigneur je le sais, mais ne faisiez-Vous pas d’autres offrandes ? Dites-moi la goutte de sang que Vous avez versée pour moi ; je La recueillerai comme mienne et je La posséderai.
Jésus : « Le ruisseau, je le versais pour toi »
Quoi, Seigneur, tout ce sang, alors qu’il eût suffi d’une goutte ?
Jésus : « Mon sang, mon âme, mon corps »
Et les autres, Seigneur, que leur réserviez-Vous ?
Jésus : « Tout entier je suis à toi »
Seigneur, dites-moi encore ceci. Pendant ces heures, dites-moi de quoi Vous avez le plus souffert ?
Jésus : « De toi »
Hélas, Jésus, Vous portiez les péchés de tous, leur poids s’accumulait ; mais dites-moi de quelle épine j’ai percé Votre front.
Jésus : « De toutes »
Quoi, Seigneur, et c’est moi aussi qui Vous ai flagellé, et moi qui Vous ai cloué, et moi qui Vous ai tué ! Et les autres alors, Seigneur, les autres qu’ont-ils fait ?
Jésus : « Ma passion c’est toi »
Mon Sauveur, Votre âme n’était-elle pas alors dans la détresse et la crainte. Dites-moi ce que Vous avez redouté le plus.
Jésus : « Te perdre »
Oui, Seigneur, je le sais, les âmes perdues rendent inutile Votre passion. Mais dites, est-il grand le nombre de ceux qui se perdent? Est-il vrai que ce nombre est plus grand que celui des élus ?
Jésus : « Je perds tout, si je te perds »
Mais encore, Seigneur, que voulez-Vous, que désiriez-Vous le plus en ce moment ?
Jésus : « Te sauver »
Vous mourriez pour tous les hommes, et Vous aviez soif de les sauver tous. Pour tant d’hommes qui causaient Votre désir ardent, un seul eût-il pu Vous désaltérer ?
Jésus : « J’ai soif de toi »
Seigneur, quel mystère ! Quoi ! Moi-même, moi seul, si je me perds, je rends Votre passion inutile ; si je me sauve, je Vous ôte tout regret d’avoir souffert ! Et les autres, quelle part apporteront-ils à Votre victoire ?
Jésus : « Sois ma victoire »
Et si je le fais, Seigneur, si je Vous rends victorieux, quelle part de gloire me donnerez-Vous ?
Jésus : « Toute ma gloire »
Ah, Seigneur, maintenant je commence à comprendre, et j’entrevois le secret de Votre amour singulier Dites ce qu’il faut que je fasse pour Vous ?
Jésus : « Aime-moi seul »
Je n’aime que Vous ; quel don d’amour apporterai-je ?
Jésus : « Donne-moi tout »
Père Victor Poucel (1872-1953)