par le père Arnaud Brelot
Evangile de Jésus Christ selon saint Matthieu
En ce temps-là, Jésus disait à ses Apôtres : « Ne craignez pas les hommes ; rien n’est voilé qui ne sera dévoilé, rien n’est caché qui ne sera connu. Ce que je vous dis dans les ténèbres, dites-le en pleine lumière ; ce que vous entendez au creux de l’oreille, proclamez-le sur les toits. Ne craignez pas ceux qui tuent le corps sans pouvoir tuer l’âme ; craignez plutôt celui qui peut faire périr dans la géhenne l’âme aussi bien que le corps. Deux moineaux ne sont-ils pas vendus pour un sou ? Or, pas un seul ne tombe à terre sans que votre Père le veuille. Quant à vous, même les cheveux de votre tête sont tous comptés. Soyez donc sans crainte : vous valez bien plus qu’une multitude de moineaux. Quiconque se déclarera pour moi devant les hommes, moi aussi je me déclarerai pour lui devant mon Père qui est aux cieux. Mais celui qui me reniera devant les hommes, moi aussi je le renierai devant mon Père qui est aux cieux. »
Aujourd’hui c’est le premier jour de l’été et normalement un peu partout aussi la fête de la musique. Pourtant les textes de la liturgie ce matin ne résonnent pas à nos oreilles comme une chanson très mélodieuse ! Tout particulièrement les paroles de Jésus dans l’évangile qui ne sont guère assimilables à une douce berceuse…. Au contraire, elles nous réveillent. Disons-le même tout haut, puisque rien n’est caché qui ne sera connu, et que beaucoup le pensent ici et maintenant : ses paroles de Jésus nous gênent, nous agacent car on n’y reconnaît pas vraiment le Jésus tout en guimauve et mièvrerie que nous avons érigé dans notre cœur de croyant. Ces paroles nous obligent donc à réagir…
Irons-nous jusqu’à nous faire censeur de l’Evangile en y ôtant tout ce qui nous gêne comme le prêtre Marcion, le fit déjà au II° siècle avec l’Ancien Testament dont il jugeait que le Dieu qui y était décrit était non compatible avec la figure du Christ ?
N’oublions pas que pour nous chrétiens toute la Bible est Parole de Dieu transmise aux hommes par des écrivains sacrés inspirés par l’Esprit Saint. Leur mission étant de nous révéler qui est vraiment Dieu. Ne pouvant pas évacuer ces textes, il nous faut entrer plus avant dans leur méditation et leur explication.
D’abord le contexte : Ce discours très incisif, Jésus le prononce dans une perspective d’envoi en mission. Il ne veut pas raconter de craques à ses disciples, (ni à nous aujourd’hui). Impossible pour Jésus de leur laisser croire que la mission est une chose facile à réaliser ni que le message à dispenser sera toujours et partout entendu pieusement et reçu joyeusement. Un rapide coup d’œil sur les 2000 ans d’histoire de la mission de l’Eglise nous permet de percevoir que de tout temps et encore plus au nôtre, ce ne fut jamais facile d’être chrétien et d’en témoigner de manière vraie.
Comme hier déjà avec ses disciples, Jésus, nous formant comme eux à la mission, pointe deux écueils à éviter et une évidence à se rappeler : d’abord éviter d’une part une attitude angélique dans notre témoignage et d’autre part une attitude de repli et de fuite ; ensuite il ne faut pas oublier la relation privilégiée qui nous lie à celui qui nous envoie. Donc 3 points dans mon homélie.
1/ éviter d’avoir une attitude angélique. Cessons de croire que le monde est prêt à recevoir la Bonne Nouvelle. Il ne l’a jamais été ! Vivre en chrétien est un combat pour nous déjà qui essayons d’être fidèles à l’Evangile et aussi à l’extérieur quand nous essayons d’en parler autour de nous. Être dans le monde sans être du monde exige une grande force intérieure et une morale solide. St Paul l’écrit aux Romains, la mort a établi son règne, et aujourd’hui comme hier le décalage est grand entre les aspirations et les désirs des hommes de ce temps et ce que propose le message chrétien. Mais si la Parole à laquelle nous avons crue est Parole de Vie et d’Amour éternels alors Il faut témoigner quoiqu’il en soit !
2/ 2° écueil à éviter : dire « la mission ce n’est pas pour moi ». Faute d’être entendu on se recroqueville sur soi et entre chrétiens. On retrouve toujours les mêmes à la messe et toujours à la même place, on ne dit plus rien sur sa foi par peur d’être moqué ou méprisé. Alors notre communauté vieillit ensemble, rassurée et satisfaite. Le signe de cela peut être par exemple pour vous mesdames le fait de laisser votre sac-à-main à votre chaise quand vous allez communier. En effet quand on connait tout le monde à la messe, on a pas peur de le laisser à sa place; ….…. Et l’étape d’après c’est la mort faute de forces neuves !
Quel est le dernier voisin, la dernière personne à qui vous avez témoigné de votre foi ? Jésus l’affirme sans ménagement : celui qui me reniera devant les hommes, moi aussi je le renierai devant mon Père qui est aux cieux….
Notre peur d’évangéliser tient beaucoup à ce que nous tenons plus à notre image et à notre amour propre qu’à faire la volonté de Dieu et à rayonner sa gloire. Oui souvent quand nous parlons de Jésus à d’autres nous pouvons pousser le même cri que le psalmiste : L’amour de ta maison m’a perdu ; on t’insulte, et l’insulte retombe sur moi.
Ainsi, il faut aller à la rencontre de tous ceux qui sont loin pour faire connaître et aimer Jésus Christ en utilisant les bons moyens et sans se lasser : par contact direct ou par le témoignage de vie ; en usant d’internet et des réseaux sociaux, etc…car rappelle Jésus, quiconque se déclarera pour moi devant les hommes, moi aussi je me déclarerai pour lui devant mon Père qui est aux cieux.
3/ n’oublions pas qui nous envoie. Jésus nous redit une chose essentielle dans l’évangile : le prix de chacune de nos vies : « les cheveux de votre tête sont tous comptés » car « ils valent bien plus qu’une multitude de moineaux, dont pas un seul ne tombe à terre sans que votre Père le veuille ». Oui nous savons que Dieu est Père et nous ne pouvons pas laisser les autres hommes dans l’ignorance d’une telle grâce qui leur est aussi destinée. Lors même dussions-nous perdre quelques cheveux dans le combat pour le salut du monde, nous aurions alors fait retentir la Bonne Nouvelle aux creux des oreilles de ceux qui sont appelés au salut, les laissant seuls maîtres pour choisir ou non de vivre pleinement l’aventure de la filiation divine.
N’oublions jamais : c’est un Père qui envoie ses fils et ses filles adoptives à la recherche et à la rencontre de ceux et celles qui ne le sachant pas encore, sont appelés à l’être avec eux ! C’est un Père qui nous revêt de sa force qu’est l’Esprit Saint pour nous soutenir dans notre mission, afin qu’à travers nos vies, nos paroles et nos actions l’amour filial et fraternel construise en Jésus-Christ l’unité de la famille humaine. Mes amis, mes frères et mes sœurs, ne craignez pas d’aller à la rencontre de ce monde vous y trouverez Dieu et des frères ! Je vous le redis avec les mots du psaume : « Vie et joie, à vous qui cherchez Dieu ! ». Amen