Lecture de la lettre aux Hébreux : Frères, le Christ est venu, grand prêtre des biens à venir. Par la tente plus grande et plus parfaite, celle qui n’est pas œuvre de mains humaines et n’appartient pas à cette création, il est entré une fois pour toutes dans le sanctuaire, en répandant, non pas le sang de boucs et de jeunes taureaux, mais son propre sang. De cette manière, il a obtenu une libération définitive. S’il est vrai qu’une simple aspersion avec le sang de boucs et de taureaux, et de la cendre de génisse, sanctifie ceux qui sont souillés, leur rendant la pureté de la chair, le sang du Christ fait bien davantage, car le Christ, poussé par l’Esprit éternel, s’est offert lui-même à Dieu comme une victime sans défaut ; son sang purifiera donc notre conscience des actes qui mènent à la mort, pour que nous puissions rendre un culte au Dieu vivant. Voilà pourquoi il est le médiateur d’une alliance nouvelle, d’un testament nouveau : puisque sa mort a permis le rachat des transgressions commises sous le premier Testament, ceux qui sont appelés peuvent recevoir l’héritage éternel jadis promis.
Le Christ est venu grand prêtre des biens à venir. C’est ainsi que commence l’épître aux hébreux que nous venons d’entendre ! Quels sont les biens à venir que Christ nous a acquis, qu’a-t-il offert pour nous les garantir ? laissons le texte lui-même nous éclairer : en répandant son propre sang…il a obtenu une libération définitive (ainsi) ceux qui sont appelés peuvent recevoir l’héritage éternel jadis promis.
Et cet héritage, c’est la vie éternelle en Dieu qui n’est pas la prolongation de nos joies terrestres et humaines, même des moments les plus intenses ; mais plutôt la pleine réalisation de ce pour quoi nous avons été créés : être participant de sa nature Divine. Oui nous sommes appelés à nous laisser diviniser pour participer à la vie même de la Trinité, c’est-à-dire pour vivre la pleine communion entre le Père, le Fils et le Saint Esprit.
Et pour que nous soyons divinisés, Jésus a dû s’offrir en sacrifice et nous envoyer l’Esprit Saint. Un sacrifice pratiqué une fois pour toutes et un don renouvelable jusqu’à la fin des temps. En donnant sa propre vie, en l’offrant en sacrifice à son Père, Jésus guérit la nature pécheresse de l’humanité car son sang purifiera notre conscience des actes qui mènent à la mort. En donnant l’Esprit Saint qui œuvre dans le monde jusqu’à la fin des temps, Jésus donne aux hommes les moyens d’être divinisés. L’Eucharistie qu’il a instituée lors de son dernier repas qui nous est relaté dans l’évangile de ce dimanche et qui prend tout son sens le lendemain quand il offre sa vie sur la croix est le moyen qu’il a choisi pour nous diviniser.
C’est cela qu’affirme le concile Vatican II dans la constitution sur la liturgie (SC 47): «Notre Sauveur, … , institua le sacrifice eucharistique de son Corps et de son Sang pour perpétuer le sacrifice de la croix au long des siècles, jusqu’à ce qu’il vienne, et … pour confier à l’Eglise, …, le mémorial de sa mort et de sa résurrection: sacrement de l’amour, signe de l’unité, lien de la charité, banquet pascal dans lequel le Christ est mangé, l’âme est comblée de grâce, et le gage de la gloire future nous est donné. »
Ainsi par l’Eucharistie que nous consommons chaque dimanche, voire chaque jour, nous est donné le salut et le gage de notre gloire future qui est notre divinisation. Elle nous prépare à l’Alliance plénière avec la Trinité. L’une des missions de l’Eglise, la première peut-être est d’actualiser, c’est à dire de rendre présent l’unique sacrifice du Christ. Ce qu’elle peut faire grâce à l’Esprit Saint donné par Jésus et invoqué par les prêtres à chaque consécration. Par l’Esprit Saint le dernier repas du Seigneur est actualisé. Je veux dire par là que chaque eucharistie nous ramène à ce repas, c’est comme si nous y assistions-nous aussi.
Avec le Concile Vatican II nous pouvons redire que l’eucharistie est bien la source et le sommet de la vie chrétienne puisque nous recevons par elles les moyens d’accomplir notre divinisation.
Mais la place de l’Eucharistie dans notre vie ne se limite pas à sa célébration proprement dite. Au-delà d’elle il y a le culte que l’on doit à l’Eucharistie. J’entends par là qu’au-delà de l’heure de la messe au cours de laquelle, le prêtre configuré au Christ, consacre le pain et le vin, la présence du Christ, de son Corps et de son Sang, demeure permanente : ce que nous, catholique, appelons la Présence Réelle et que nous gardons précieusement au tabernacle. La lumière rouge dans chaque église invite dans le silence, à la génuflexion ou au moins à une inclination respectueuse, à un bonjour, à un ‘je t’aime’ qui est déjà un culte rendu à notre Seigneur. Benoit XVI dans une homélie de la messe du Corps et du Sang du Seigneur redit que prendre ce temps, court mais au combien parlant, réaffirme que cette présence constante de Jésus parmi nous et avec nous, (est) une présence concrète, à proximité, comme le « cœur battant» de la ville.
Ce geste de reconnaissance doit aussi devenir un geste d’adoration car il affirme que La rencontre avec Jésus dans la Sainte Messe est vraiment et pleinement accomplie quand la communauté est capable de reconnaître que Lui, le Saint Sacrement, habite sa maison, nous y attendait, nous invite à sa table, puis, après que l’assemblée est dissoute, reste avec nous, discret et silencieux » On ne peut pas séparer communion et adoration. Car de même que pour communiquer avec une personne que j’aime, je sais me tenir debout à côté d’elle et dans le silence la regarder et l’écouter avec amour, de même le véritable amour et l’amitié vraie avec le Seigneur se vivent dans cette réciprocité des regards, les silences intenses, éloquent, plein de respect et de vénération, de sorte que la rencontre soit vécue profondément, personnellement et non superficiellement.
Redécouvrir la joie du geste d’adoration, en entrant à l’église, en en sortant ou lors d’un temps spécial d’adoration, voilà une manière sûre de vivre plus intensément l’alliance que permet la célébration de l’Eucharistie. Des temps d’adoration sont proposés dans certaines de nos églises, pourquoi ne pas les développer dans toutes, réaffirmant que si la messe n’est pas célébrée, le Christ demeure présent au cœur de nos villages. A chacun d’organiser et de prendre ce temps auprès du st Sacrement exposé ou non, seul ou avec d’autres dans l’église de son village pour redire l’immense mystère de Jésus avec nous tous les jours jusqu’à la fin du monde ! Alors soyez inventifs ! Amen