Évangile de Jésus Christ selon saint Jean : En ce temps-là, Pilate appela Jésus et lui dit : « Es-tu le roi des Juifs ? » Jésus lui demanda : « Dis-tu cela de toi-même, ou bien d’autres te l’ont dit à mon sujet ? » Pilate répondit : « Est-ce que je suis juif, moi ? Ta nation et les grands prêtres t’ont livré à moi : qu’as-tu donc fait ? » Jésus déclara : « Ma royauté n’est pas de ce monde ; si ma royauté était de ce monde, j’aurais des gardes qui se seraient battus pour que je ne sois pas livré aux Juifs. En fait, ma royauté n’est pas d’ici. » Pilate lui dit : « Alors, tu es roi ? » Jésus répondit : « C’est toi-même qui dis que je suis roi. Moi, je suis né, je suis venu dans le monde pour ceci : rendre témoignage à la vérité. Quiconque appartient à la vérité écoute ma voix. »
« Alors, tu es roi ? » Sur quel ton, à votre avis Pilate pose-t-il la question à Jésus ? Est-ce celui de l’ironie : ce Jésus vêtu comme un mendiant, livré entre ses mains se prétend roi ? Est-ce le ton lasse d’un Pilate fatigué qui doit régler le problème d’un nouvel illuminé qui se prend pour un roi ? Est-ce celui de l’inquiétude, voyant en Jésus un trublion à maitriser en ce temps de pâques juives où une rébellion peut se déclencher alors que toute la foule des croyants est massée à Jérusalem…
Et nous-même, quand nous réfléchissons à la royauté de Jésus, quelle tonalité donnons-nous à cette affirmation ? En effet, nous qui vivons en république depuis tant de décennies, comment percevons-nous la royauté du Christ, n’est-ce pas pour nous quelque chose de suranné, qui sent un peu la naphtaline ; passé non réglé de l’Eglise pré-conciliaire ? C’est que la fête du Christ Roi qui fut instituée par le pape Pie XI en 1925 était célébrée fin octobre. Mais depuis la réforme liturgique de 1969, elle est célébrée, le dernier dimanche du calendrier liturgique sous le titre « Christ Roi de l’univers ». Elle met donc l’accent sur l’idée que dans le Christ toute la création est récapitulée. En effet, Christ, comme Fils éternel de Dieu, a présidé à la création de l’univers avec l’Esprit Saint et il a sauvé ce même univers dans sa mort et sa résurrection. Désormais Christ le gouverne et le tient dans sa main. Ce que st Jean dans son apocalypse résume par ses paroles de Jésus : je suis l’Alpha et l’Oméga, dit le Seigneur Dieu, Celui qui est, qui était et qui vient, le Souverain de l’univers. D’autre part en tant que Dieu fait homme, le Christ est celui vers qui toutes les nations de tous les temps convergent pour ne faire plus qu’un : le peuple des rachetés, son peuple élu comme le prophétisa Daniel :tous les peuples, toutes les nations et les gens de toutes langues le servirent.
Donc, aujourd’hui encore, cela a du sens de parler du Christ comme d’un roi. Reste à déterminer quel genre de roi, de royaume, régnant de quelle manière, sur qui ?
1/ Jésus est Roi : au temps de Jésus, cela fait plus de 5 siècles que son peuple, le peuple juif est sous domination étrangère. La terre d’Israël où Jésus est né étant occupée à tour de rôle par les grandes puissances de l’époque : Babylone, Assyrie, Grèce, Empire Romain, etc. Toutes ses épreuves, ses humiliations vont faire naître et grandir dans le peuple juif l’Espérance d’être libéré de ses occupants par un envoyé de Dieu, un messie qui devra autant être un grand prêtre qui restaurera le vrai culte dû à Dieu qu’un homme de guerre capable de mettre dehors les ennemis d’Israël. Le peuple va s’accrocher aux promesses de Dieu relayées par les prophètes au cours des siècles : Dieu libérera son peuple… Mais de quelle libération parle-t-on, de quel ennemi ce grand roi-prêtre devra libérer son peuple : des Romains ? Pas vraiment, le vrai ennemi c’est le mal et le péché qui se cachent dans le cœur des hommes ! Voilà ce qui détruit réellement le peuple de Dieu : le péché !
Ainsi le vrai roi d’Israël devra être plus qu’un homme, il devra être Dieu lui-même pour pouvoir combattre et l’emporter contre le mal, contre le péché et son auteur, Satan. Oui ce grand roi devra « tuer la mort et le péché » et faire entrer l’humanité dans la nouvelle alliance. Mais comment va-t-il procéder ?
2/ il règne par l’humilité. Jésus est le Fils que Dieu envoie aux humains pour les sauver du vrai ennemi qui est Satan père du mensonge et du péché. Jésus est le roi qui combat seul pour sauver son peuple, qui lutte contre le mal et le péché en les prenant sur lui, en les clouant avec lui sur la croix. Jésus est roi en exerçant d’une manière unique sa royauté : il règne en refusant d’user de sa force, il règne en acceptant de se faire faible, en renonçant à utiliser sa toute-puissance.
3/ car dit Jésus dans l’évangile : ma royauté n’est pas de ce monde. Dans ce monde soumis au pouvoir de Satan, un puissant fait sentir sa supériorité en déployant sa superbe, en paradant, en habitants de beaux palais, etc. Le Christ-Roi quant à lui, est un « roi d’humilité, roi sans palais roi sans armée » né sur la paille d’une étable. Il exerce sa puissance en s’anéantissant, portant sa croix et montant sur elle pour en faire son trône. Un puissant selon ce monde assujettit ses sujets, les accable de prélèvements et d’impôts, le Christ-Roi libère son peuple du péché, paie de sa propre vie son salut et fait de ceux qu’il sauve ses héritiers, ses égaux. Il règne par l’amour qui voit au-delà du mal, la capacité de faire le bien de chacun. Il règne par l’amour : en offrant jusqu’à sa propre vie, il désarme le mal, pardonne les péchés et fait advenir un bien plus grand. De pécheurs il fait des fils et des filles de Dieu, des membres du peuple saint, des héritiers de son Père, des citoyens des cieux.
4/ ainsi nous sommes ses sujets. Nous que le baptême a plongé dans la mort et la résurrection du Christ-Roi, nous sommes rendus participant de sa royauté. Il nous incombe donc de le prendre pour modèle et de gouverner nos vies et servir ce monde à sa manière, grâce à sa vie qu’il nous donne dans les sacrements. A nous aussi de vivre sobrement, d’agir non par la force mais par la vérité, non par domination mais par amour. Chère Estelle, vous qui demandez à rejoindre officiellement l’Eglise Catholique, ce que vous allez faire dans quelques minutes, je vous invite à vivre ainsi à la suite du Christ, à établir dans votre vie et autour de vous, le règne de Dieu et de régner avec lui par le service, la prière et le témoignage de la joie d’être citoyenne des cieux ! Amen