homélie de la Sainte Cène du Seigneur

Vitrail du lavement des pieds.© THOMAS QUINE/CREATIVE COMMONS

Évangile de Jésus Christ selon saint Jean : Avant la fête de la Pâque, sachant que l’heure était venue pour lui de passer de ce monde à son Père, Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout. Au cours du repas, alors que le diable a déjà mis dans le cœur de Judas, fils de Simon l’Iscariote, l’intention de le livrer, Jésus, sachant que le Père a tout remis entre ses mains, qu’il est sorti de Dieu et qu’il s’en va vers Dieu, se lève de table, dépose son vêtement, et prend un linge qu’il se noue à la ceinture ; puis il verse de l’eau dans un bassin. Alors il se mit à laver les pieds des disciples et à les essuyer avec le linge qu’il avait à la ceinture. Il arrive donc à Simon-Pierre, qui lui dit : « C’est toi, Seigneur, qui me laves les pieds ? » Jésus lui répondit : « Ce que je veux faire, tu ne le sais pas maintenant ; plus tard tu comprendras. »  Pierre lui dit : « Tu ne me laveras pas les pieds ; non, jamais ! » Jésus lui répondit : « Si je ne te lave pas, tu n’auras pas de part avec moi. » Simon-Pierre lui dit : « Alors, Seigneur, pas seulement les pieds, mais aussi les mains et la tête ! » Jésus lui dit : « Quand on vient de prendre un bain, on n’a pas besoin de se laver, sinon les pieds : on est pur tout entier. Vous-mêmes, vous êtes purs, mais non pas tous. » Il savait bien qui allait le livrer ; et c’est pourquoi il disait : « Vous n’êtes pas tous purs. » Quand il leur eut lavé les pieds, il reprit son vêtement, se remit à table et leur dit : « Comprenez-vous ce que je viens de faire pour vous ? Vous m’appelez “Maître” et “Seigneur”, et vous avez raison, car vraiment je le suis. Si donc moi, le Seigneur et le Maître, je vous ai lavé les pieds, vous aussi, vous devez vous laver les pieds les uns aux autres. C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous.

Le geste inouï de Jésus, à genoux devant ses disciples et leur lavant les pieds, est celui d’un serviteur, voire d’un esclave. Que Celui devant lequel, à la fin des temps, tout genou fléchira au ciel, sur terre et aux enfers, se mette en ce jour à genoux devant ses disciples, donc devant chacun de nous, se faisant leur serviteur, leur esclave, voilà qui interpelle.

Ce geste si plein d’humilité, d’amour me saisit car il définit en profondeur ce qu’est le sacerdoce des prêtres en ce jour où nous faisons mémoire de l’institution de l’Eucharistie.

En effet, servir est le premier engagement que prend le prêtre le jour de son ordination : Quand l’évêque lui demande : Voulez-vous devenir prêtre, collaborateur des évêques dans le sacerdoce, pour servir et guider sans relâche le peuple de Dieu sous la conduite de l’Esprit Saint. Le futur prêtre répond : « oui je le veux ».

Servir et guider telle est la façon dont le prêtre consent à vivre son ministère auprès des fidèles s’il se laisse saisir par l’Esprit Saint. Mais s’il agit ainsi, ce n’est pas seulement pour le peuple, c’est aussi pour que le peuple des baptisés fasse de même. Le rôle du prêtre est, en servant, de faire de chacun de vous des serviteurs qui prendront leur part à l’édification du Royaume qui vient. Voilà pourquoi Jésus dit après avoir fait ce geste du lavement des pieds : C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous.

Frères et sœurs vous êtes les témoins que les prêtres que nous sommes ne comptent ni leur temps ni leur santé, pour servir et guider le saint peuple de Dieu que vous êtes. Malgré nos défauts et avec les grâces que Dieu nous donne au jour de notre ordination, nous avons toujours à cœur de vous guider vers le Royaume qui vient ; de marcher devant vous pour montrer le chemin, de marcher avec vous pour renforcer la fraternité, de marcher derrière vous pour soutenir et encourager les plus faibles.

Oui il s’agit pour les prêtres, comme pour chacun de vous de faire comme Jésus a fait ce soir-là. Faire comme Jésus, le prendre en exemple, c’est réitérer entre nous le geste liturgique que je vais poser dans un instant. Je garde en mémoire la première réunion d’EAP que nous avons faite avec la nouvelle équipe il y a 3 ans déjà, et lors de laquelle nous nous sommes lavé les pieds les uns les autres, une initiative d’André notre DP qui a permis que se noue dès ce soir-là l’unité fraternelle de notre équipe.

Faire comme Jésus, le prendre en exemple c’est aussi lier ensemble la célébration de l’eucharistie et le service des frères. C’est vrai pour les prêtres, dont les mains ointes par le saint chrême servent à consacrer le pain et le vin pour en faire le Sacrement de l’Amour ; l’Eucharistie. Un prêtre ne peut pas être plus serviteur qu’au moment où il célèbre la messe, puisqu’il offre le Christ au monde et pour le monde. Il offre celui qui s’est offert une fois pour toute. Quand un prêtre célèbre la messe il rend aussi présent le moment précis où Jésus donne sa vie sur la croix, montrant ainsi à ses disciples jusqu’où peut aller le serviteur qui se met à sa suite.

C’est tout aussi vrai pour chacun de vous. Lors de la communion vous recevez le Corps du Christ qui vous nourrit, vous guérit, vous relève et vous divinise. Faisant de chacun de vous le bon pain de son amour offert à tous ceux qui ont faim et soif d’amour, de tendresse, de pardon et de miséricorde. Oui vous recevez le Corps du Christ pour devenir le Corps du Christ envoyé dans le monde pour témoigner, servir et aimer en son nom.

Comme l’a dit le pape François dans sa dernière catéchèse sur l’Eucharistie : Par l’Eucharistie, le Seigneur Jésus entre en nous, en notre cœur, en notre chair, afin que nous puissions « exprimer dans notre vie le sacrement reçu dans la foi ».Nous passons donc de la célébration à la vie, conscients que la messe se réalise dans nos choix concrets si nous nous laissons impliquer en personne dans les mystères du  Christ….participer à l’Eucharistie  poursuit-il nous engage également vis-à-vis des autres, en particulier des pauvres, en nous apprenant à passer de la chair du Christ à celle de nos frères, en lesquels le Christ attend d’être reconnu, servi, honoré, aimé8.(Je vous invite si ce n’est pas encore fait à lire toutes les catéchèses du pape sur l’Eucharistie réunies dans le petit livre que le doyenné vous a offert au début du carême )

Préparons-nous maintenant à célébrer le repas des serviteurs, recevant dans la joie le Corps de celui qui s’est fait homme pour servir et non pas être servi. Amen